Comment concilier la quête existentielle individuelle avec des choix éthiques, un financement respectueux, et le rôle fondamental de la liberté et de la dignité humaine ?
L’entreprise
Baruch Spinoza, dans son ouvrage « Éthique », utilise le terme latin « conatus » pour décrire l’effort ou l’entreprise qui constitue la force motrice derrière la persévérance dans l’existence.
Selon Spinoza, le « conatus » représente l’effort inné de chaque être pour persévérer dans son être. Si nous étendons cette idée à la vie en général, alors toute existence pourrait être considérée comme une forme d’entreprise, dans le sens où chaque individu fait constamment des efforts pour se maintenir, se développer et persévérer dans l’existence.
Ainsi, l’idée d’entreprise, influencée par la philosophie de Spinoza, pourrait être étendue au-delà du cadre strictement commercial pour englober toute activité visant à maintenir et à améliorer la vie. Cela suggère que l’entreprise, comprise comme un effort constant de persévérer, peut être appliquée à toutes les formes de vie, de la naissance à la mort, transcendant ainsi les limites traditionnelles de l’économie et du commerce.
La liberté et les choix
Søren Kierkegaard met en avant la notion d’existence individuelle et souligne le rôle de la liberté dans le choix des objectifs de vie.
Selon Kierkegaard, l’individu doit faire des choix authentiques qui donnent un sens à son existence. Dans le contexte de l’entreprise de maintien de la vie, cela pourrait signifier que les objectifs peuvent être déterminés de manière subjective, en fonction des valeurs, des passions et des engagements personnels.
L’idée d’effectuation, telle que développée par la chercheuse en entrepreneuriat Saras Sarasvathy, correspond à une approche où les entrepreneurs agissent en fonction de ce qu’ils peuvent faire, en tirant parti des opportunités émergentes plutôt qu’en suivant un plan prédéterminé. Cette approche peut être liée à l’idée kierkegaardienne de choisir ses propres objectifs en fonction des circonstances et des capacités individuelles.
En adoptant une perspective existentielle, les objectifs de l’entreprise de maintien de la vie peuvent varier d’une personne à l’autre. Certains peuvent chercher à vivre une vie pleine d’enseignements et d’aventures, tandis que d’autres peuvent rechercher l’enrichissement financier, la volupté, ou encore un impact significatif sur la société. Kierkegaard souligne que l’essentiel est que ces objectifs soient choisis de manière authentique, en accord avec la nature profonde de l’individu, plutôt que d’être imposés par des normes externes.
Le financement et la dignité
Se pose alors la question du financement de cette activité, qui traditionnellement était prodiguée par les capitalistes qui alors exploitaient le fruit du travail de l’entrepreneur en prélevant une marge sur la commercialisation. Dès lors toute entreprise doit-elle permette une marchandisation ?
Selon Immanuel Kant, chaque individu est une fin en soi, et non un moyen pour atteindre un objectif. Appliqué à la question du financement de la vie choisie, cela soulève des questions éthiques concernant l’exploitation du travailleur et la commercialisation de la vie elle-même. La commercialisation de certaines expériences de vie pourrait être perçue comme traitant la vie comme un moyen pour atteindre des fins lucratives, ce qui, du point de vue kantien, pourrait être moralement problématique.
Cependant, il existe des nuances dans l’éthique kantienne, notamment le concept d’universalisation des maximes. Si une activité ou une commercialisation peut être universellement acceptée sans contradiction, elle pourrait être considérée comme moralement acceptable selon la perspective kantienne.
La question de savoir si tout est moralement commercialisable dépend donc de la nature spécifique de l’activité en question et de la manière dont elle traite la dignité humaine. Certains pourraient soutenir que des formes de commercialisation peuvent respecter les principes kantiens en ne traitant pas la vie comme un simple moyen, tandis que d’autres pourraient estimer que certaines expériences de vie sont intrinsèquement incompatibles avec une approche éthique de la commercialisation.
Synthèse des idées
Les philosophies de Spinoza, Kierkegaard et Kant peuvent converger vers une vision holistique de l’existence et de la vie. Spinoza, avec son concept de « conatus », souligne l’effort inné de chaque être pour persévérer dans son existence. Kierkegaard, en insistant sur l’importance de choix authentiques, met l’accent sur la liberté individuelle dans la définition des objectifs de vie. Kant, quant à lui, met en avant le respect de la dignité humaine comme impératif catégorique.
Une idée commune pourrait émerger de la synthèse de ces perspectives : la vie est une entreprise individuelle, où chaque personne cherche à persévérer dans son existence en faisant des choix authentiques tout en respectant la dignité humaine.
Dans cette perspective, l’entreprise de maintien de la vie ne se limite pas à des objectifs strictement commerciaux, mais englobe des aspirations diverses telles que l’aventure, l’enrichissement, la volupté, etc. Ces aspirations doivent être poursuivies de manière authentique, respectant à la fois la liberté individuelle et la dignité inhérente à chaque personne.
Concernant la question du financement de cette entreprise de vie, une approche kantienne peut guider les choix éthiques en évitant l’exploitation et en veillant à ce que les activités commerciales respectent la dignité humaine. En effet, la commercialisation peut être acceptable si elle ne traite pas la vie comme un simple moyen, mais plutôt comme une expression authentique de l’individu.
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